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Photo du rédacteurQuentin Perissinotto

Les Furies, entre petite et grande déception



Si je devais exprimer mon ressenti en comparaison de mes attentes initiales, je dirais que ce roman fut une grande déception ; mais si je devais uniquement dire ce que j’en ai pensé à la fin de ma lecture, Les Furies de Lauren Groff ne sont qu’une petite déception. L’histoire s’ouvre sur un mariage et commence comme un conte de fées : jeunes, séduisants, promis à un avenir glorieux et surtout follement amoureux, Lotto et Mathilde tourbillonnent, rayonnants. Rideau noir, fondu enchainé. Projecteur sur Lotto. Sur son enfance passée à se laisser embrigader et à fumer des joints, traîner dans les endroits malfamés. D’ado boutonneux et sans intérêt, il s’est mué en étudiant brillant et charismatique, irradiant de grâce sur scène en jouant Shakespeare. À la fête de fin d’années, les lumières qui sont toutes braquées sur Lotto se déplacent lentement sur une créature à la beauté aussi longiligne que mystérieuse : Mathilde. Quelques semaines plus tard, ils sont mariés. Leur vie de couple, leur carrière, leurs idéaux, tout s’enchaîne. Leurs fêlures aussi. Car repose-t-on vraiment le masque une fois la dernière représentation donnée ?


Alors que les histoires sur les couples-parfaits-mais-en-fait-pas-vraiment pullulent, Les Furies ont la bonne idée de casser ce cliché qui voudrait que le couple explose car la femme est malheureuse et qu’elle le cache. Ici, on sent bien le malaise grandir mais sans savoir qu’elle est son origine. Ni les anciens amis de Lotto, ni le lecteur, n’arrivent à comprendre comment tient ce couple et comment ils font pour faire cohabiter leurs démons intérieurs. Quelque chose de nébuleux échappe. Car justement l’un et l’autre cherchent à se dérober, sans le pouvoir. Ils portent chacun le propre poids d’un passé tourmenté et ces parts brisées ne cherchent pas à s’emboîter. C’est ce que j’ai trouvé vraiment intéressant dans ce roman et qui m’a plu : on s’éloigne très clairement du manichéisme des romans de couple à la mode. Oui ce couple a priori parfait ne l’est pas vraiment une fois la nuit tombée, mais non c’est plus compliqué qu’un lourd secret ou une tristesse refoulée. Et c’est le véritable moteur du roman. Second bon point : Lauren Groff arrive vraiment à faire surgir des pages les personnages à qui elle donne vie. Les Furies est pleinement incarné par Lotto et Mathilde, ils nous emportent avec eux dans le sillage de leurs rêves et de leur désespoir. Et c’est très rare d’atteindre une telle proximité. Mais malgré tout, ce roman reste une déception. Malgré les bonnes idées et le charisme des personnages, malgré la narration aussi bien ficelée que les rôtis de mon grand-père, ce roman me laisse un goût d’inachevé. Chaque fois qu’une scène était développée et que ça cristallisait des enjeux principaux, Lauren Groff balayait ça d’un coup de plume et sautait quelques années. Ce qui aurait pu être convaincant comme procédé au début s’est révélé un peu dérangeant et une impression de superficialité m’a gagné. Surtout que la narration souffre de quelques longueurs, principalement vers le milieu du livre…


Je n’ai pas passé un mauvais moment de lecture en compagnie de Lauren Groff et de ses Furies, mais je n’ai pas été aussi happé et conquis que j’aurais aimé l’être. Des Furies qui manquaient de fureur, en somme.


 

Les Furies – 2018

Lauren Groff

Points

528 p.

8.50 €

ISBN : 978-2757861271

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