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Photo du rédacteurQuentin Perissinotto

Stand-by, entre série télévisée et feuilleton littéraire



Daniel Vuataz, Aude Seigne et Bruno Pellegrino portraiturés par Frédéric Pajak (© Frédéric Pajak)

Ça y est, nous y sommes de nouveau, la rentrée littéraire est de retour ! Passés Désérable, Adimi, Ducrozet, bienvenus à Beigbeder, Jauffret, Adam… Mais plutôt que de parler de la rentrée et de ses traditionnels romans, tournant toujours autour des mêmes codes, intéressons-nous plutôt à un livre, guère plus grand qu’un format poche, qui se propose comme l’antithèse du roman de rentrée littéraire. Et pour cause, ce n’est pas un roman ! Stand-by, c’est le projet ambitieux des éditions Zoé avec aux manettes trois écrivains – Bruno Pellegrino, Aude Seigne et Daniel Vuataz – et qui a pour but de mélanger la littérature au feuilleton et à la série télévisée. Le tout sous l’œil des dessins affirmés de Frédéric Pajak.

La littérature titillée par la série télévisée

« (à suivre.) » C’est sur ces mots que le lecteur referme les quelques 170 pages que comporte ce récit à six mains. Dix-huit chapitres qui forment la charpente du premier épisode de la saison 1 de Stand-by. L’histoire est celle d’une dizaine de personnages, reliés par un seul événement : l’irruption soudaine d’un volcan dans la région de Naples. Alix, sur le point de s’envoler pour New York depuis Paris doit revoir ses plans. Au Monténégro, Nora, Vasko et Virgile, trois adolescents, se retrouvent sans adultes et découvrent l’indépendance, grisante et inquiétante. Au même moment, une équipe de jeunes Européens qui accomplissent leur Service climatique obligatoire reste bloquée au cœur du Groenland, loin de tout secours. L’idée est simple : proposer une série littéraire jalonnée de quatre épisodes pour la première saison, qui s’égrèneront tout le long de l’année 2018, de janvier à septembre. L’ambition ? Titiller la littérature en lui introduisant des codes empruntés à la série télévisée, et en voyant comment on peut réorganiser un récit sous ces traits-là. C’était donc là le pari lancé par Caroline Coutau, la directrice des Editions Zoé, à ses trois auteurs.

Derrière Stand-by, l’AJAR


Aude Seigne

Bruno Pellegrino, Aude Seigne et Daniel Vuataz sont des habitués du jeu formel littéraire. Tous trois membres de l’AJAR, ce collectif suisse romand d’émulation littéraire, ils ont brossé ce récit ensemble, se sont partagés les tâches, les schémas et ont retravaillé le corps du texte une fois le récit embrayé. Ainsi, retrouver l’AJAR derrière ce projet n’est pas une surprise, tant ce collectif montant s’est vu être aux source de nombreux projets littéraires où le maître-mot était le bouleversement des codes.

Une idée convaincante pour un résultat convaincant ?


Daniel Vuataz

Alors que trop souvent la littérature souffre d’un manque de souffle, que l’on voit pulluler nombre de livres qui ne sont que de fades réécritures, il est important d’oser des choses. De tenter de nouvelles formes, d’essayer de s’affranchir des codes narratifs classiques, sans quoi la littérature ne deviendrait qu’une espèce de truite gigotant hors de l’eau, moribonde. Aussi le projet tenté par les Editions Zoé est de bon augure ! Mais passé ce moment d’égayement et de surprise, il faut scruter le texte pour savoir si le pari a été remporté. Autant l’idée de départ est convaincante, autant le résultat peine à l’être… Le récit souffre de beaucoup de longueurs (alourdi par une écriture factuelle et trop distante), et si certains personnages s’imposent au fil de l’histoire, d’autres se trouvent ballotés par la narration et ne décrochent aucune consistance. Les incessants allers et retours géographiques font perdre au lecteur le fil du récit qu’il arrivait péniblement à tenir. Bien sûr, l’idée d’une succession de courts chapitres, qui embarquent le lecteur d’une scène à l’autre est l’un des fameux codes des séries. Mais à force de poser un décor pour le souffler deux ou trois pages plus loin, le texte se contente être quelque chose de diffus, peut-être confus, loin de la frénésie recherchée par les cuts scénaristiques. Black Mirror, Breaking Bad : deux séries citées comme filiation de Stand-by. Mais là encore, l’héritage est lourd, trop lourd. C’est peut-être là que se situe le soucis : le projet n’est-il pas trop ambitieux ? Il est indéniable que Stand-by est nourri de bonnes idées, mais la révolution annoncée par ce projet n’arrive pas, les codes sont certes un peu bousculés, mais pas transgressés.

A suivre… alors attendons !

Ce n’est pas impossible que puisque Stand-by saison 1 se compose de quatre épisodes, que ce premier livre n’ait été pensé que comme un préambule, une sorte de galerie de personnages. Et qu’il incombait au second tome de poser les différents enjeux de l’histoire. Alors attendons de voir comment s’agence la suite pour tirer un bilan définitif de Stand-by. Par contre – et c’est peut-être ça qui va faire oublier les faiblesses du premier opus – la fin assez brutale, sans beaucoup d’explications laisse présager un second épisode qui sera lui bien plus dynamique.

Stand-by 1/4 – 2018

Bruno Pellegrino, Aude Seigne et Daniel Vuataz

Zoé

176 p.

19 CHF

ISBN : 978-2889274611

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