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  • Photo du rédacteurQuentin Perissinotto

Les grandes dames de l'impressionnisme 3/4


Lorsque l’on déambule dans les expositions partout dans le monde, et que l’on arrive dans les salles consacrées à la peinture du XIXème siècle, ce sont les mêmes noms que l’on observe : Monet bien sûr, Corot, Manet, Pissaro, Degas ou encore Renoir. Mais derrière ces moustaches qui frétillent et ses cannes qui se balancent se cachent des toiles oubliées du grand public et souvent des musées eux-mêmes. Alors que l’impressionnisme est à son apogée à Paris, quatre femmes peintres se distinguent, brisant avec énergie les carcans de cette société Second Empire. Il s’agit de Berthe Morisot, Mary Cassatt, Eva Gonzalès, et Marie Bracquemond ; et avec Les grandes dames de l’impressionnisme nous vous dressons le portrait de l’impressionnisme et ses peintres femmes en quatre temps. Aujourd'hui, Eva Gonzaès.

Deux soeurs, deux peintres


Une loge aux italiens (1874)

Continuons notre voyage dans les figures féminines de l’impressionnisme, cette fois-ci avec Eva Gonzalès. Née en 1849, la jeune Eva Gonzalès grandit dans une famille de la grande bourgeoisie (son père est feuilletoniste et romancier et sa mère musicienne) à Paris. Son père présida même la Société des Gens de Lettres. A l’âge de seize ans, elle commence à étudier chez le peintre Charles Chaplin, en compagnie notamment de Mary Cassatt. Son talent s’affermit et quatre ans plus tard, en 1869, elle entre dans l’atelier d’un autre peintre, plus controversé dans le monde de l’art : Edouard Manet. Comme… Berthe Morisot, avec qui elle aura une rivalité à la fois sur le plan artistique, mais également sur le plan amical. Sa sœur, Jeanne, est elle aussi peintre, mais aquarelliste. Elle lui servira régulièrement de modèle.

Premières expositions


Enfant de troupe (1870)

Eva Gonzalès expose ses premières toiles en 1870 (l’artiste étant seulement âgée d’une petite vingtaine d’années) au Salon du Grand Palais. Un tableau en particulier est inspiré d’une autre toile de Manet : Enfant de troupe faisant écho au Fifre de son maître. Ce n’est pas étonnant ; on sait Manet grand passionné de peinture espagnole, mais Eva Gonzalès s’intéresse très tôt également aux grands noms espagnols, en particulier à Goya et ses dessins. L’Etat achète le tableau.

Un talent foudroyé à 34 ans


Manet, Portrait d'Eva Gonzalès (1869-1879)

Son talent commence à venir aux oreilles des amateurs d’art étrangers : d’abord en Belgique, puis à Londres, on est émerveillé de trouver chez une si jeune artiste autant de tempérament. Elle continue d’envoyer des toiles pour le Salon, le préférant aux expositions indépendantes afin de rendre officielle sa participation féminine à l’art de son époque. Et ceci malgré l’orientation de plus en plus impressionniste de sa peinture ! En 1878, les deux sœurs exposent ensemble au Salon officiel, alors que l’œuvre de Manet est elle encore refusée ! Un an plus tard, soit en 1879, elle épouse le peintre graveur Henri Guérard, un proche ami de Manet, qui lui est témoin au mariage. Elle meurt quatre ans plus tard, après avoir donné naissance à un petit Jean-Raymond, foudroyée par une embolie. Elle avait alors 34 ans.

Peintre de la sphère intime bourgeoise


Portrait d'une femme en blanc (1879)

Si l’immense potentielle d’Eva Gonzalès n’a pas pu s’exprimer, elle a cependant livré de nombreuses très belles toiles, ayant souvent pour sujet des scènes d’intérieur et des portraits bourgeois, puisque les autres lieux n’étaient pas accessibles à des peintres femmes. Elle s’essaya aux paysages mais son expérience limitée ne lui permis pas de rivaliser avec les grands paysagistes impressionnistes tels Sisley ou Pissaro. Son œuvre pleine de sensibilité et de poésie connut un immense succès de son vivant, notamment grâce aux tons pastels et aux couleurs vives et claires qui rappelleront plus tard les jeux de lumières des plus grands impressionnistes. Mais Eva Gonzalès ne se borne pas à une représentation convenable des femmes de son époque mais tente de se saisir des thèmes qu’affectionnaient particulièrement ses confrères masculins, comme des scènes de toilette féminine. Mais sous son pinceau, l’érotisme s’efface au profit de l’observation de l’intime. Elle échappe aux accusations de mièvrerie et de sentimentalité grâce à des tons justes mais surtout, grâce à son geste vif, énergique, parfois qualifié de « masculin ». Sa facture est aussi large qu’énergique : de plus en plus régulièrement, elle abandonne les tons transitoires et le détail pour la forme éclatante. Eva Gonzalès reste en raison de sa disparition, la peintre impressionniste la moins connue. Et pourtant son œuvre s’impose d’elle-même.

Pour aller plus loin :

Livres :

Manœuvre, Laurent : Les pionnières, Editions des Falaises, 2016

Rey, Jean-Dominique : Berthe Morisot, Flammarion, 2016

Vadepied, Guy : Mary Cassatt. Les impressionnistes et l'Amérique, Encrage, 2014

Romans :

Manet, Eduardo : Le fifre, Ecriture, 2011

Bona, Dominique : Berthe Morisot. Le secret de la femme en noir, Le Livre de Poche, 2002

Film :

Berthe Morisot de Caroline Champetier (2013)

Emission radio :


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